Cour Pénale Internationale

Présentation

La Cour pénale internationale (CPI) est un tribunal de dernier recours pour les poursuites de crimes internationaux graves, notamment le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. Fondée à travers le Statut de Rome, adopté en juillet 1998, la Cour a commencé à opérer en 2003. La CPI est la première institution internationale permanente créée par traité pour contribuer à mettre fin à l’impunité des auteurs des crimes les plus graves qui touchent la communauté internationale.

La Cour ne se substitue pas aux systèmes nationaux de justice pénale mais les complète. Elle ne peut poursuivre et juger des personnes que si les systèmes nationaux en question n’engagent pas de procédure ou s’ils proclament leur intention de le faire sans avoir réellement la volonté ou la capacité de mener véritablement à bien des poursuites. Il s’agit du principe fondamental de complémentarité.

Il existe trois manières pour le Bureau du Procureur d’ouvrir une enquête ou d’engager des poursuites:

    • les État parties au Statut de la CPI peuvent déférer des situations au Bureau du Procureur ;
    • le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies peut demander au Bureau du Procureur d’ouvrir une enquête ;
    • le Bureau du Procureur peut ouvrir des enquêtes proprio motu (de sa propre initiative) sur le fondement de renseignements reçus de sources dignes de confiance.

 

CPI et Violences sexuelles

. Article 7 – Statut de Rome : « Crimes contre l’humanité
1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l’humanité l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque : (…) g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable; »

. Article 8 – Statut de Rome : « Crimes de guerre
1. La Cour a compétence à l’égard des crimes de guerre, en particulier lorsque ces crimes s’inscrivent dans le cadre d’un plan ou d’une politique ou lorsqu’ils font partie d’une série de crimes analogues commis sur une grande échelle.
2. Aux fins du Statut, on entend par « crimes de guerre » (…) xxii) Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, telle que définie à l’article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle constituant une infraction grave aux Conventions de Genève; »

. Éléments de crime de la CPILe document a été adopté pour aider la Cour à interpréter et appliquer les articles 6 à 8 bis du Statut, qui définissent les crimes relevant de sa compétence. Ainsi, des dispositions sont expressément prévues en matière de crimes de violences sexuelles et basées sur le genre: Viol  / Prostitution forcée  / Grossesse forcée  / Autres formes de violences sexuelles.

. Article 70 – Règlement de procédure et de preuve :  « Principes applicables à l’administration de la preuve en matière de violences sexuelles
Dans le cas de crimes de violences sexuelles, la Cour suit et, le cas échéant, applique les principes suivants :
a) Le consentement ne peut en aucun cas être inféré des paroles ou de la conduite d’une victime lorsque la faculté de celle-ci de donner librement un consentement véritable a été altérée par l’emploi de la force, de la menace ou de la contrainte, ou à la faveur d’un environnement coercitif ;
b) Le consentement ne peut en aucun cas être inféré des paroles ou de la conduite d’une victime lorsque celle-ci est incapable de donner un consentement véritable ;
c) Le consentement ne peut en aucun cas être inféré du silence ou du manque de résistance de la victime de violences sexuelles présumées ;
d) La crédibilité, l’honorabilité ou la disponibilité sexuelle d’une victime ou d’un témoin ne peut en aucun cas être inférée de leur comportement sexuel antérieur ou postérieur. »

Jurisprudence

Affaire Le Procureur c. Callixte MBARUSHIMANA – La Chambre Préliminère I : « 135. Je conclurais pour ma part qu’il existe des motifs substantiels de croire que le Suspect est responsable, au sens de l’article 25-3-d du Statut, des crimes dont la Chambre a constaté la commission par les FDLR et je confirmerais donc les charges suivantes : attaques lancées contre la population civile constituant un crime de guerre (chef 1), meurtre constituant un crime contre l’humanité (chef 2), meurtre constituant un crime de guerre (chef 3), mutilations constituant un crime de guerre (chef 4), actes inhumains constituant un crime contre l’humanité (chef 5), traitements cruels constituant un crime de guerre (chef 6), viol constituant un crime contre l’humanité (chef 7), viol constituant un crime de guerre (chef 8), destruction de biens constituant un crime de guerre (chef 11) et pillage constituant un crime de guerre (chef 12). »

Affaire le Procureur c. Thomas LUBANGA DYILON – Chambre de Première Instance : « Rappel de la procédure: 68. Pour les raisons exposées plus haut, dans la partie expliquant la procédure à suivre à ce stade, la Chambre est fondée à prendre en considération les violences sexuelles dans le cadre de la fixation de la peine à prononcer, et ce, en dépit du fait qu’elles ne faisaient pas partie intégrante de la Décision sur la confirmation des charges. Compte tenu des garanties procédurales en vigueur, aucune iniquité ne résulterait de la prise en considération par la Chambre des violences sexuelles. »

Affaire Le Procureur c. Mathieu NGUDJOLO CHUI – Chambre de Première Instance II : « Corroboration: La règle 63-3 du Règlement interdit à la Chambre d’«impose[r] […] l’obligation juridique de corroborer la preuve des crimes relevant de la compétence de la Cour, en particulier des crimes de violences sexuelles». La mesure dans laquelle un élément de preuve suffit, à lui seul, à prouver un fait litigieux dépend entièrement du point litigieux lui-même et de la solidité de l’élément de preuve considéré. En conséquence, la Chambre a, là encore procédé au cas par cas. »

Affaire Le Procureur c. Dominic ONGWEN – Chambre Préliminaire II : « 123. Dominic Ongwen a contribué à la réalisation du plan commun en montrant l’exemple en enlevant personnellement des femmes et des filles, en les contraignant à devenir ses épouses par la force et des esclaves sexuelles, en les violant et en les torturant ; ordonnant aux troupes sous son commandement d’enlever des femmes et des filles pour les épouser par la force et pour en faire des esclaves sexuelles ; en ordonnant à ses subordonnés de frapper les femmes ou les filles pour les discipliner ou lorsqu’elles refusaient d’avoir des rapports sexuels. Ses ordres étaient exécutés, et des femmes étaient enlevées à divers endroits dans le nord de l’Ouganda pour ensuite devenir des esclaves, des esclaves sexuelles, être torturées, violées, et épouser par la force des combattants de l’ARS de la brigade Sinia ; (…); ayant un contrôle opérationnel sur la mise en œuvre du plan commun relatif aux crimes sexuels au sein de la brigade Sinia ; (…) »

Le Procureur c. Jean-Pierre BEMBA GOMBO – Chambre de Première Instance III : « Fixation de la peine : 93. La Chambre a conclu qu’en l’espèce, les crimes de meurtre, de viol et de pillage étaient d’une grande gravité. Elle a conclu que deux circonstances aggravantes s’appliquaient au crime de viol, en ce qu’il avait été commis:  i) contre des victimes particulièrement vulnérables et ii) avec une cruauté particulière.»

 

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