Argentine

Commission Nationale sur la Disparition de Personnes

Le 24 mars 1976, le gouvernement d’Isabel Martínez de Perón est renversé suite à un coup militaire mené par  le général Jorge Rafael Videla. La dictature qui s’ensuit, connue sous le nom de «Processus de réorganisation nationale » ou « Proceso de Reorganización Nacional »,  sera responsable de l’emprisonnement de milliers d’opposants politiques, de l’enlèvement et de la disparition de plus de 300 000 individus ainsi que de l’exil de millions de ressortissants argentins.  Par ailleurs, cette dictature participera activement à l’opération Condor dont le but était d’empêcher par tous les moyens possibles, incluant l’assassinat, l’essor du communisme en Amérique latine. Ainsi sont mis sur pieds des escadrons de la mort qui terroriseront  le pays avec l’appui des services secrets. C’est pourquoi, afin d’enquêter sur les violations graves des Droits de l’Homme commis sous ce régime, la Commission Nationale sur la Disparition de Personnes (CONADEP) a été créée en décembre 1983 en Argentine. En 1984, à l’issue de son mandat, le Rapport final Nunca Más fut présenté.

Les documents concernant l’organisation et le mandat de la CONADEP n’ont pas été trouvés.

CHRONOLOGIE

1943 : une junte d’officiers, dont fait partie Juan Domingo Perón, s’empare du pouvoir. 

1946 : élu président de la République, Perón crée la doctrine « justicialiste », mélange de nationalisme, de populisme et de réformisme social.  

1955 : Perón est renversé par un coup d’Etat militaire. S’ensuit une période d’instabilité et de violence politique.  

1973 : Perón est réélu président. A sa mort, neuf mois plus tard, sa femme Isabel lui succède.  

1976 : coup d’Etat militaire dirigé par le général Videla. Début de sept années de dictature marquées par une brutale répression à l’encontre des opposants

1982 : la débacle de la « guerre des Malouines », déclenchée par la junte contre la Grande-Bretagne sonnent la retraite de la junte militaire.  

 

 

1983 : élection du radical Raul Alfonsin et mise en place de la CONADEP

1984 : publication du rapport « Nunca más »

1985 : procès des principaux dirigeants de la junte militaire. Le général Videla et l’amiral Massera sont condamnés à la prison à vie.  

1986 : le gouvernement vote la loi du « point final », puis un an plus tard, celle de « l’obéissance due », mettant fin à la mise en accusation de militaires pour violations des droits de l’homme du temps de la dictature.  

1989 : le péroniste Carlos Menem est élu à la présidence de la République.  

1990 : Carlos Memen grâcie les derniers militaires de haut rang encore en prison. 

La commission en details

Création : 15 décembre 1983

Dissolution : 20 septembre 1984

Base juridique : Décret No 187/1983

Composition : 16 membres
– 10 nommés dans le décret
– 6 nommés par les 2 chambres du Congrès national

Membres nommés par le décret : Ricardo COLOMBRES, René FAVALORO, Hilario FERNANDEZ LONG, Carlos T.GATTINONI, Gregorio KLIMOVSKY, Marshall MEYER, Jaime F. de NEVARES, Eduardo RABOSSI, Magdalena RUIZ GUIÑAZU, Ernesto SABATO (Président)

Membres nommés par la Chambre des députés: Santiago Marcelino LOPEZ, Hugo Diógenes PIUCILL, Horacio Hugo HUARTE

La Commission a publié son propre règlement intérieur et nommé un comité exécutif composé de 4 membres réguliers pour s’occuper des affaires courantes. 5 secrétariats ont été créés pour traiter efficacement des aspects dynamiques de la Commission, selon la diversité des questions.

-La secrétaire chargé de la collecte des plaintes: Graciela Fernández Meijide.
– Le secrétaire chargé du traitement des dossiers: Daniel Salvador.
– Le secrétaire chargé du suivi des procédures: Raúl Peneón.
– Le secrétaire chargé des affaires juridiques: Alberto Mansur.
– Le secrétaire administratif: Leopoldo Silgueira.
– Le secrétaire général: Agustín Altamiranda.

Mandat : éclaircir les faits relatifs à la disparition de personnes survenus dans le pays pays entre 1976 et 1983.

 

Compétences :

I. Recevoir les plaintes et collecter les preuves relatives aux délits et crimes commis durant cette période  et les rapporter à la Commission concernée.

II. Découvrir la vérité sur les circonstances entourant la disparition de personnes (localisation des corps, sévices infligées).

III. Déterminer la situation des enfants soustraits à la garde de leurs parents à la suite des mesures prises pour le prétendu motif de réprimer le terrorisme et faire intervenir les organismes et tribunaux de protection des mineurs dans leur cas.

IV.  Signaler à la justice toute tentative de dissimulation, de soustraction ou de destruction d’éléments de preuve relatifs aux faits à éclaircir.

V. Produire un rapport final, avec une explication détaillée des faits étudiés, dans les180 jours de sa constitution

 

conclusions & recommandations

Le 20 septembre 1984, le rapport final intitulé « Nunca mas » a été remis par les membres de la Commission au Président de la République. Il inclut les conclusions et recommandations suivantes :

Conclusions:

– 8960 disparitions pendant le régime militaire de 1976 à 1983 ont été confirmées.

– Les disparitions, la torture, la détention secrète et l’élimination des corps dans des sites inconnus étaient des pratiques systématiques.

– Toutes les personnes disparues ont été tuées, et le manque d’informations fournies sur ces personnes était une stratégie intentionnelle du gouvernement pour empêcher la cohésion entre les survivants.

– Les pratiques répressives de l’armée ont été planifiées et ordonnées par les plus hauts niveaux du commandement militaire, mais le général Reynaldo, président de facto, a ensuite ordonné la destruction de la documentation militaire qui aurait pu prouver la responsabilité au sein de la chaîne de commandement.

Recommandations:

– Mettre en place un programme de réparation pour les familles des disparus et poursuivre les enquêtes concernant les disparitions non élucidées.

– Réformer le système judiciaire.

– Renforcer l’éducation aux droits de l’homme.

Mesures prises post-recommandations

– Le président Alfonsín a approuvé officiellement les conclusions de la commission.

– Adoption du Décret No 3090/1984, qui a induit la création du Secrétariat des droits de l’homme au sein du Ministère de la Justice afin de systématiser  la transmission aux tribunaux des données collectées par la CONADEP. Sont  également systématisées la recherche et l’identification de personnes disparues.

– Autorisation de la diffusion d’un documentaire de deux heures sur les travaux de la commission. L’armée a cependant rejeté le rapport.

– En 1992, la Commission nationale pour le droit à l’identité a été créée, centralisant la recherche des enfants disparus pendant  les guerres clandestines menées en Argentine.

– En 1994, l’Argentine a réformé sa Constitution afin de renforcer la démocratie et d’élever les traités internationaux ratifiés par le Congrès au rang de loi constitutionnelle. La constitution réformée oblige l’État à adopter des mesures positives pour garantir la pleine jouissance des droits de l’homme.

– Les informations recueillies par la commission ont été cruciales dans le procès de la junte militaire, et cinq généraux ont finalement été emprisonnés. Toutefois, la législation adoptée à la fin des années 1980 a mis fin aux poursuites contre d’autres auteurs.

– La série de lois d’amnistie, adoptées par le régime militaire en 1983, a ensuite été abrogée par le gouvernement civil en 2003. L’abrogation des lois d’amnistie a entraîné une vague de procès contre près de 700 personnes. En 2010, un peu plus de cinquante condamnations ont été prononcées.

– En 2004, 3 milliards de dollars américains ont été alloués aux réparations pour les victimes de détention illégale. Pour avoir droit à une indemnisation, les victimes devaient prouver qu’elles avaient été détenues sans procès entre 1976 et 1979. L’armée s’est toutefois montrée peu coopérative et n’a pas fourni la plupart des documents nécessaires.

La prise en compte des violences sexuelles

Les abus sexuels ayant été perpétrés pendant le Processus de réorganisation nationale n’ont pas été spécifiquement traités par la Commission.

Documents complémentaires

Mediatheque audiovisuelle

A voir aussi