Canada

Commission Vérité et Réconciliation

De 1831 aux années 1990, des milliers d’enfants autochtones ont intégré de force les pensionnats indiens. Ces établissements, subventionnés par le gouvernement et dirigés par les églises, avaient pour but d’évangéliser les peuples indiens du Canada afin de les assimiler à la société canadienne. Ces pensionnats sont le théâtre de punitions violentes, de malnutrition et de traitements inhumains et dégradants. Un nombre important de ces enfants autochtones a disparu. Beaucoup ont également subi des abus physiques et sexuels. 

La Commission Vérité et Réconciliation (CVR) du Canada a été mise en place en 2009 afin d’enquêter sur le système des pensionnats indiens et ses conséquences sur les communautés autochtones. La CVR a rendu son rapport final en 2015 contenant “94 appels à l’action” pour encourager la réconciliation entre les Canadiens et les peuples autochtones.

Chronologie

1831 : Création du premier pensionnat indien. 

 

1920 : L’intégration des pensionnats indiens devient une obligation pour les enfants autochtones. 

 

1996 : Le dernier pensionnat indien ferme ses portes.

 

1996 : Publication du Rapport de la commission royale sur les peuples autochtones (CRPA) relatif aux répercussions des pensionnats indiens sur la perte de la langue et les traumatismes. 

 

2006 : Adoption de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens (CRRPI) qui reconnaît les dommages infligés aux peuples autochtones par les pensionnats au Canada, ouvre une compensation aux survivants et prévoit la création de la Commission de vérité et de réconciliation (CVR). 

 

2008 : Création de la Commission de vérité et de réconciliation.

 

2008 : Le gouvernement canadien présente ses excuses aux anciens élèves ainsi qu’à leurs familles et à leurs communautés pour le rôle qu’il a joué dans l’administration des pensionnats. 

 

2012 : Publication du rapport intermédiaire de la CVR. 

 

2015 : Publication du rapport de la CVR composé de « 94 appels à l’action » visant à réparer les traumatismes nés du système des pensionnats indiens et à contribuer au processus de réconciliation canadienne. Ce rapport qualifie le système des pensionnats indiens de génocide culturel. 

 

2019 : Le Centre national pour la vérité et la réconciliation met en ligne un registre public des noms des enfants décédés dans les pensionnats.

 

2019 : Adoption de la loi sur les langues autochtones garantissant une protection des langues autochtones du Canada. 

 

2020 : Adoption de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis affirmant la compétence autonome des peuples autochtones en matière de services à l’enfance et à la famille. 

 

2021 : Adoption de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et proclamation de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation au Canada. 

la commission en détails

Création : 1er juin 2008 

Dissolution : 18 décembre 2015 

Base juridique : Convention de règlement relative aux pensionnats indiens du 8 mai 2006

 

Composition : 1 Président et 2 commissaires 

Président : Harry S. Laforme (2008),  Murray Sinclair (2009-2015) 

Commissaires : Jane Brewin Morley  et Claudette Dumont-Smith (2008), Wilton Littlechild et Marie Wilson (2009-2015) 

Les titulaires sont nommés, après consultation de l’Assemblée des Premières Nations, parmi des candidats proposés par d’anciens élèves, et par des organisations autochtones, des entités religieuses ainsi que le gouvernement.
Le Mandat de la Commission précise qu’elle doit se composer d’un président et de deux commissaires, dont au moins un des trois membres doit être autochtone. 

 

Mandat : Enquêter sur les abus perpétrés au sein des pensionnats indiens entre 1831 et 1996 et déterminer les séquelles et conséquences durables sur les populations autochtones.

 

 

Compétences :

– Reconnaître les expériences, les séquelles et les conséquences liées aux pensionnats

– Créer un milieu holistique, adapté à la culture et sûr pour les anciens élèves, et leurs familles et collectivités, quand ils se présentent devant la Commission

– Appuyer, promouvoir et faciliter l’organisation des événements de vérité et de réconciliation, et participer à de tels évènement au niveau national et communautaire

– Sensibiliser et éduquer le public canadien sur le système des pensionnats et ses répercussions

– Repérer les sources et créer un dossier historique le plus complet possible sur le système des pensionnats et ses séquelles

– Préparer et soumettre aux parties à la Convention un rapport, assorti de recommandations destinées au gouvernement du Canada, portant sur le système et l’expérience des pensionnats et présentant les aspects suivants : historique, objet, fonctionnement et supervision du système des pensionnats, effet et conséquences des pensionnats (notamment les séquelles systémiques, les conséquences intergénérationnelles et les effets sur la dignité humaine) et les séquelles permanentes de ces pensionnats

– Appuyer la commémoration des anciens élèves des pensionnats et de leurs familles

Conclusions et recommandations

Le 15 décembre 2015, le rapport final intitulé « Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir » est publié par la Commission, il contient 94 recommandations. Il inclut notamment les conclusions et recommandations suivantes : 

Conclusions :

– La CVR qualifie le système des pensionnats indiens comme un cas de « génocide culturel » visant à éliminer les peuples autochtones en tant que peuples distincts et à les assimiler contre leur gré à la société canadienne. Les pensionnats indiens ont ainsi représenté un assaut contre les familles autochtones et contre la culture autochtone. 

– Les violences physiques et sexuelles étaient des pratiques généralisées à l’égard des élèves au sein des pensionnats.

– La commission estime que plus de 6000 enfants y auraient laissé leur vie. Au moins 3 200 élèves de pensionnats indiens sont morts de malnutrition et de maladies liées aux mauvaises conditions de vie. 

– La CVR considère que les séquelles séquelles nées du traumatisme des pensionnats indiens affectent non seulement les pensionnaires eux-mêmes, mais également leurs communautés. Elle identifie notamment les problèmes de violence et d’alcoolisme et souligne les taux élevés de suicide, de dépression et maladies mentales. Le rapport fait également état du nombre important d’incarcération et d’intervention des services de protection de l’enfance dans ces familles. 

Recommandations :

– Elaborer des campagnes de sensibilisation visant à instruire le grand public à propos de l’histoire des pensionnats indiens et de leurs séquelles sur leur territoire ;

– Ériger plusieurs monuments nationaux sur les pensionnats et de les installer de manière à ce qu’il soit accessible au public et très visible et organiser des commémorations publiques reconnaissant et réparant les dommages et torts causés par le système des pensionnats indiens. 

– Soutenir et promouvoir le patrimoine traditionnel, spirituel, culturel et linguistique des peuples autochtones du Canada.

– Allouer les ressources nécessaires pour mettre sur pied un centre durable de guérison axé sur la santé mentale et le bien-être, avec spécialisation dans le traitement de traumatismes subis pendant l’enfance et des deuils de longue durée.

– Adopter des programmes d’aide dans plusieurs domaines incluant l’éducation, la justice, la prévention de la violence, la santé etc. 

– Créer une commission d’enquête sur les femmes autochtones disparues ou assassinées.

– Adopter, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, des dispositions législatives visant à mettre sur pied un conseil national de réconciliation.

– Mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones dans le cadre de la réconciliation.

mesures post-recommandations

En décembre 2015, le premier ministre, Justin Trudeau, a assisté à la cérémonie de publication du Rapport final de la Commission vérité et réconciliation et s’est engagé à mettre en œuvre les 94 recommandations établies. Il a également rencontré les dirigeants des organisations autochtones nationales et a promis de rencontrer ses organisations tous les ans dans le but de poursuivre les progrès réalisés en matière de priorités communes et de s’assurer de les faire progresser.

Nous observons aujourd’hui que de nombreuses mesures ont été adoptées afin de mettre en œuvre les 94 recommandations. Nous pouvons notamment souligner les mesures post recommandations suivantes : 

 

– Septembre 2016 :  le gouvernement crée la Commission d’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Elle publiera son rapport final, intitulé « Réclamer notre pouvoir et notre place », le 3 juin 2019. 

–  21 juin 2019 : la loi sur les langues autochtones accorde une protection aux langues autochtones du Canada. 

– 1er janvier 2020 : la loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis affirme les droits et la compétence des peuples autochtones en matière de services à l’enfance et à la famille.

– 21 juin 2021 : la loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones élabore un plan d’action pour atteindre les objectifs de la Déclaration.

– 30 septembre 2021 : la première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation est célébrée en l’honneur des victimes des pensionnats indiens. 

Un Conseil national de réconciliation visant à surveiller et évaluer les progrès réalisés en matière de réconciliation est en cours de création.

Prise en compte des violences sexuelles

La question des violences sexuelles n’est pas clairement mentionnée dans le mandat de la Commission vérité et réconciliation du Canada, néanmoins dans son rapport final la commission y fait explicitement référence. La Commission a établi avec précision les abus sexuels subis par les élèves et a apporté la preuve de la responsabilité du système des pensionnats dans la perpétration de ces crimes. Les violences sexuelles étaient une pratique généralisée au sein des pensionnats indiens

Le rapport reconnaît également les séquelles, à courtes et longues durées, de ces violences. Les conséquences de ces traumatismes se transmettent bien souvent de génération en génération. Il est notamment avancé que les traumatismes consécutifs des pensionnats indiens, et notamment des violences sexuelles en leur sein, seraient à l’origine de la surreprésentation actuelle des peuples autochtones dans les centres pénitenciers et les systèmes de protection de l’enfance. Ainsi, parmi les recommandations du rapport final figure: « Nous demandons aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de travailler avec les collectivités autochtones pour offrir des services culturellement adaptés aux détenus en ce qui concerne, notamment, la toxicomanie, la famille et la violence familiale de même que les difficultés auxquelles fait face une personne lorsqu’elle tente de surmonter les séquelles de la violence sexuelle. »

En parallèle, la Commission d’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées avait, elle, expressément pour mandat de « faire rapport sur les causes systémiques de toutes formes de violence – y compris la violence sexuelle – à l’égard des femmes et des filles autochtones au Canada ». Dans son rapport final, elle définit la violence sexuelle comme suit : « Il y a violence sexuelle lorsqu’une personne est forcée de participer à des activités sexuelles contre son gré. » La Commission reconnaît dans son rapport final l’importance du problème des violences sexuelles à l’égard des femmes autochtones. Elle relève que « les femmes autochtones sont agressées sexuellement au moins trois fois plus souvent que les femmes non autochtones, et la plupart des femmes et des enfants victimes de traite au Canada sont des Autochtones »Cette généralisation des violences sexuelles à l’égard des femmes autochtones est reconnue comme une conséquence des actes commis au sein des pensionnats indiens. 

Documents complémentaires

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