République Démocratique du Congo

Commission Vérité et Réconciliation

Face au génocide rwandais de 1994 où le gouvernement à majorité hutu tua en masse de nombreux membres de la communauté minoritaire tutsie, cette dernière organisa le Front patriotique rwandais (FPR) et reprit le pouvoir la même année. Par crainte de représailles, de nombreux hutus ont donc fui vers le Zaïre (RDC), et plus spécifiquement vers le Nord-Kivu sous la « bienveillance » du dictateur congolais Mobutu. Néanmoins, le gouvernement rwandais n’entendait pas s’arrêter là et s’aventura au Nord-Kivu pour déloger les Hutus Rwandais ayant fui. Pour cela, le Rwanda n’hésita pas à s’ingérer dans la politique congolaise en aidant Laurent-Désiré Kabila, leader de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) à renverser Mobutu. C’est ainsi, qu’entre 1996 et 1997 eut lieu la première guerre du Congo, une sorte d’extension du conflit rwandais sur le sol congolais. Suivant la prise de pouvoir de Kabila en mai 1997, le pays devint la République Démocratique du Congo (RDC) et la guerre s’arrêta. Néanmoins, elle reprit peu de temps après que Kabila eut remercié les forces rwandaises et qu’il les invita urgemment à quitter le pays. En réaction, les minorités tutsies et Banyamulenge (groupe rwandophone) du Congo se réunirent sous le Rassemblement congolais pour la Démocratie (RCD) et reprirent les armes contre l’armée officielle de Kabila.  Suivant la mort de ce dernier, un cessez-le-feu fut signé le 16 décembre 2002, conformément à l’Accord de Sun City et la guerre prit partiellement fin. En effet, partiellement, car celle-ci perdure encore à l’Est notamment pour le contrôle des ressources naturelles L’on estime qu’environ 5,4 millions de personnes seraient décédées directement ou indirectement (blessures, maladies, homicides, famine) suivant ces deux guerres.

 

I. La Commission Vérité et Réconciliation en période de transition politique (2003-2007)

Ainsi, conformément à  la clause V de l’accord de Sun City et au chapitre 5 de la Constitution de la Transition de 2003, la Commission Vérité et Réconciliation fut créée pour enquêter sur les violations graves des Droits de l’Homme commises sur le territoire par les forces armées congolaises, les rebelles et milices entre 1960 et 2003. Cependant, ratissant une période très large de son histoire, l’enquête s’avéra être une tâche trop vaste pour une seule commission. D’autre part, puisque les 21 membres représentés au sein de la commission provenaient des différents groupes impliqués dans le conflit, cette commission ne put être objective et faire son travail de recherche de la vérité correctement. En outre, le fait que les élections post-transition se déroulèrent à la même période que le « processus de réconciliation nationale » déclencha un conflit d’intérêts. En effet, certains membres se soucièrent davantage des élections et des sphères de pouvoir que de la justice. Sujette à la politisation, la commission a pris fin en 2007 et n’a produit qu’un léger rapport de 84 pages sans réelle conclusion. Elle a seulement convenu à l’unanimité qu’une seconde Commission Vérité et Réconciliation serait nécessaire après les élections de 2006. Il est à noter que  le rapport final est introuvable.

 

II. Une Commission Vérité et Réconciliation post-transition ?

Selon le gouvernement en vigueur dirigé par le Président Félix Tshisekedi depuis janvier 2019, un mécanisme de justice transitionnelle devrait, sous son mandat, voir le jour. Des enquêtes devront être ouvertes et des dédommagements octroyés aux victimes. Le Docteur Mukwege, prix Nobel de la paix a salué l’initiative du président Tshisekedi qu’il dit être un « homme politique sans lien avec les crimes du passé ». Cependant, cette volonté n’est qu’à un stade conceptuel et non opérationnel. De ce fait, ses résultats ne peuvent être encore évalués.

chronologie

1994 : suite au génocide rwandais, plus d’1million de Hutus se réfugie dans l’est du Zaïre, pour fuir le Front patriotique rwandais (à majorité tutsi) qui s’est emparé de Kigali.  

Août-septembre 1996 : des combats éclatent dans le Kivu entre l’armée zaïroise et des Banyamulenge (congolais tutsis mais d’origine rwandaise) appuyés par l’armée de Kigali.

Octobre 1996 : création de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL), dirigée par Laurent-Désiré Kabila et soutenue par l’Ouganda et le Rwanda.

Février 1997 : la rébellion contrôle le Katanga.

Mai 1997 : Mobutu fuit Kinshasa. Le lendemain, les rebelles entrent dans la capitale et le Zaïre devient la République démocratique du Congo (RDC). Laurent-Désiré Kabila s’attribue alors les pleins pouvoirs.

Juillet -Septembre 1997 : dans le Kivu, plus de 2 000 personnes ont été tuées lors d’affrontements entre militaires et milices d’autodéfense.  

Juin 1998 : un rapport de l’ONU dévoile que les forces de Kabila ont commis de nombreux massacres entre 1996 et 1997 contre les réfugiés rwandais hutus dans l’ex-Zaïre.

Août 1998 : l’Ouganda et le Rwanda soutiennent un mouvement de rébellion banyamulenge dans le Kivu et la rébellion annonce la création du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). Le conflit se transforme aussitôt en une guerre régionale. C’est-à-dire les factions rebelles soutenues par le Rwanda et l’Ouganda contre les forces gouvernementales de Kinshasa, appuyées par l’Angola et le Zimbabwe.  

Juillet 1999 : un accord de cessez-le-feu est signé à Lusaka mais n’est jamais entré en vigueur.

Mai 2000 : selon Amnesty International, des milliers de civils ont été tués, torturés et sont portés disparus.

Janvier 2001 : Laurent-Désiré Kabila est assassiné par l’un de ses gardes du corps. Son fils, Joseph Kabila lui succède.

Février-avril 2002 : débute un dialogue inter-congolais à Sun City (Afrique du Sud), qui déboucha sur un accord partiel de partage du pouvoir, mais il ne fut pas appliqué.

Décembre 2002 : signature à Pretoria d’un accord de paix, qui doit mener le Congo, sous la supervision d’un gouvernement de transition pour deux ans, à des élections générales.  

Avril 2003 : après 19 mois de négociations, est signé à Sun City l’acte final de pacification.

Juin 2003 : est désigné un gouvernement d’union nationale pour la transition.

Juillet 2003 : le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) annonce la fin de la guerre contre Kinshasa. Opérationnalisation de la CVR.

Août 2003 : installation d’un Parlement de transition. 

la comission en détails

Création : juillet 2003

Dissolution : février 2007

Base juridique : loi n° 04/018 du 30 juillet 2004, portant création, attributions et fonctionnement de la Commission vérité et réconciliation.

Composition :  21 membres
–  8 officiels
– 13 représentants provinciaux faisant office de commissaires

Le Président et les sept autres membres formant le Bureau sont désignés par les Composantes et Entités au Dialogue inter-congolais conformément à la Constitution de la transition. Les autres membres sont des personnalités issues de confessions religieuses ou d’associations représentant la société civile. Sur les huit membres du bureau, six étaient des hommes et deux des femmes.

Président : Mgr Jean-Luc Kuye Ndondo wa Mulemera

Deux commissions spéciales travaillaient ensemble. La première chargée de la recherche de la vérité portant sur les crimes et les violences liées au conflit ; la seconde, spécialisée sur l’aspect réconciliatoire, mettant l’accent sur la cohabitation inter-ethnique.

Mandat: enquêter sur les causes et l’étendue des crimes politiques, des violations massives des droits humains commises tant par les Congolais que par les étrangers à l’encontre des populations congolaises sur le territoire national et en dehors de celui-ci depuis le 30 juin 1960 jusqu’à la fin de la transition.

Compétences :

I. Recevoir toute déposition des témoins en rapport avec les violations massives des droits humains.

II. Enquêter sur les événements politiques, socio-économiques et autres ayant perturbé la paix et la justice en RDC.

III. Identifier les auteurs et dégager les responsabilités individuelles et/ou collectives dans l’accomplissement desdits crimes et violations.

IV. Identifier les victimes et déterminer l’étendue des préjudices subis.

V. Proposer à l’autorité compétente l’acceptation ou le rejet de toute requête individuelle ou collective d’amnistie pour les faits de guerre et les infractions politiques et d’opinion.

VI. Capitaliser les acquis de la Conférence Nationale Souveraine et du Dialogue inter-congolais.

VII. Élaborer un rapport complet des activités de la Commission Vérité et Réconciliation sur les résultats obtenus, les mesures proposées et les réformes nécessaires pour prévenir la répétition des violations des droits humains ainsi que la commission des crimes les accompagnant.

Conclusions & recommandations

La publication dudit rapport étant introuvable, il est impossible de les annoter ici.

mesures prises post-recommandations

Etant donné l’échec de la Commission, aucune mesure de transition ne fut réellement prise.

la prise en compte des violences sexuelles

Les violences sexuelles et autres crimes fondés sur le genre n’ont pas été incluses dans le mandat de la Commission. Par conséquent, elles n’ont pas été traitées.

documents complémentaires

mediatheque audiovisuelle

A voir aussi