Gambie

Commission Vérité, Réconciliation et Réparation

Le 22 juillet 1994, Yahya Jammeh arrive au pouvoir suite à un coup d’Etat. Il sortira vainqueur des 3 élections présidentielles suivantes et restera ainsi au pouvoir 22 années d’affilées. Durant ses différents mandats, son gouvernement multipliera les accusations de graves violations des droits humains, telles que des assassinats, des actes de torture, des disparitions forcées, des viols, des arrestations arbitraires…

Dès le 13 décembre 2017, l’Assemblée nationale de la République de Gambie a adopté la loi établissant la Commission Vérité Réconciliation et Réparations (TRCC). Du 7 janvier 2019 au 27 mai 2021, cette commission a mené 392 auditions. Elle a remis son rapport final le 25 novembre 2021 au Président Adama Barrow. Ce rapport est réparti en 17 volumes thématiques.

Chronologie

22 juillet 1994 : Arrivée au pouvoir de Yahya Jammeh suite à un coup d’état militaire. Un gouvernement transitoire est mis en place jusqu’en 1996. Élu président en 1996, 2006 et 2011, il restera au pouvoir jusqu’en 2017. Son régime sera synonyme de graves et nombreuses violations des droits humains. Yahya Jammeh sera notamment accusé d’être impliqué dans le massacre en 2005 de plus de 50 migrants d’Afrique de l’Ouest, dans l’assassinat du journaliste Deyda Hydara et dans l’administration contrainte d’un faux traitement contre le VIH. 

10 décembre 2015 : La Gambie devient une République islamique. 

1er décembre 2016 : Défaite de Yahya Jammeh à l’élection présidentielle, remportée par Adama Barrow. Le 17 janvier 2017, Yahya Jammeh instaure l’Etat d’urgence. Le lendemain, le parlement prolonge son mandat de trois mois, jusqu’au 19 avril 2017.

20 janvier 2017 : Sous la pression de la CEDEAO et après l’intervention de l’armée sénégalaise, Yahya Jammeh quitte le pouvoir et s’exile en Guinée équatoriale.

13 décembre 2017 : Adoption par l’Assemblée nationale de la République de Gambie de la loi sur la Commission Vérité Réconciliation et Réparations. 

15 octobre 2018 : Adama Barrow nomme les 11 commissaires de la Commission vérité, réconciliation et réparations. 

7 janvier 2019 : La Commission Vérité Réconciliation Réparations débute ses audiences. 

13 janvier 2020 : Yahya Jammeh demande dans un enregistrement à rentrer au pays. Par la suite, des milliers de ses partisans réclament son retour. 

29 avril 2020 : La Commission Vérité Réconciliation Réparations soumet son rapport provisoire au gouvernement. 

27 mai 2021 : Fin des auditions de la Commission Vérité Réconciliation Réparations. 

Septembre 2021 : Adama Barrow et l’Alliance patriotique pour la réorientation et la construction (APRC) de l’ancien président Yahya Jammeh scellent une alliance. 

25 novembre 2021 : La Commission Vérité, Réconciliation et Réparations en Gambie remet son rapport final au président Adama Barrow. 

19 janvier 2022 : Réélection d’Adama Barrow pour un 2ème mandat

La Commission en details

Création : 13 décembre 2017

Base juridique : Loi de 2017 sur la Commission Vérité, Réconciliation et Réparations

Composition : 11 membres nommés par le Président de la République de Gambie.

Lamin J. Sise (Président) ; Adélaïde Sosseh Gaye (Vice-président) ; Anna N’gulu Jones ; Mustapha Kah ; Abdourahman Sey ; Ma Nyima Bojang ; Amie Samba ; Lang Kinteh ; Jammeh Ceesay ; James Yaw Allen Odico ; Ousainou Jallow

Le Président a nommé les membres de la Commission après consultation du Ministère, de l’Association des organisations non gouvernementales, de la Fédération gambienne des personnes handicapées, du Conseil national de la jeunesse, l’Association des Femmes avocates de Gambie, l’Union de la Presse Gambienne, les organisation de victimes de Gambie, l’Association du Barreau de la Gambie, les gouverneurs régionaux, les directeurs généraux du conseil municipal de Banjul et du conseil municipal de Kanifing.

Mandat : Éclaircir les faits relatifs aux violations et des atteintes aux droits humains commises de juillet 1994 à janvier 2017.

Compétences :

– Recueillir les preuves relatives aux violations et abus des droits de l’homme de juillet 1994 à janvier 2017. Pour cela, elle peut utiliser toutes les voies qu’elle juge appropriées. Elle peut notamment visiter tous les établissement ou lieux sans préavis, à toute fin utile à
l’accomplissement de son mandat, et mener l’interrogatoire de tout individu, groupe ou membre d’organisations ou d’institutions.

– Entreprendre des enquêtes et des recherches sur les principaux événements et les causes d’abus ou de violations et organiser des séances publiques sur les thèmes et les institutions qu’elle juge appropriés.

– Établir et faire connaître le sort des victimes disparues ou le lieu où elles se trouvent.

– Accorder des réparations aux victimes dans les cas appropriés.

– Produire deux rapports : un rapport intermédiaire détaillant ses activités après 1 an d’exercice, et un rapport final sur ses activités et ses conclusions. La Commission doit inclure dans ce rapport final des recommandations au Président.

ConclusionS et recommandations

La Commission Vérité, Réconciliation et Réparations gambienne a rendu son rapport final au Président de la République le 25 novembre 2021. Il inclut les conclusions et recommandations suivantes :

Conclusions :

Les 392 témoignages entendus par la Commission montrent que les violations des droits de l’homme commises par le gouvernement de la Gambie entre juillet 1994 et janvier 2017 étaient massives et variées. Les violations décrites par les témoins comprennent des abus de pouvoir généralisés, des arrestations et des détentions arbitraires, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des violences sexuelles et sexistes, une chasse aux sorcières, des traitements inhumains et dégradants, des faux traitements contre le VIH, ainsi que des actes de torture généralisés et systématiques.

Recommandations :

– Poursuite des principaux responsables des violations des droits de l’homme et des abus commis entre juillet 1994 et janvier 2017. Ainsi que destitution et interdiction d’exercer de fonctionnaires impliqués dans de graves violations des droits humains.

– Octroi d’amnistie possible selon les termes et conditions établis, sur la demande d’une
personne.

– Révision de la Constitution et certaines lois nationales afin de s’assurer de leur conformité au droit international et régional des droits de l’homme, notamment les lois pénitentiaires et les
lois sur les médias.

– Enquête sur les personnes disparues, afin de les retrouver et les identifier.

– Renforcement de l’éducation aux droits de l’homme.

– Restructuration de l’Agence nationale de renseignement (NIA).

Mesures post-recommandations

Il n’y a pour le moment pas eu de mesures prises suite aux recommandations de la Commission.

La prise en compte des violences sexuelles

Dans la loi sur la Commission Vérité Réconciliation et Réparations, dans la section 2 (a), les violencessexuelles sont explicitement énumérées comme des violations des droits de l’homme.

Dès son commencement, la Commission a fait de la lutte contre les violences sexuelles une priorité. Il s’agit de l’un des principaux thèmes de travail de la Commission intitulé  » Violences sexuelles et violences basées sur le genre ». Cette thématique représente un volume à elle toute seule dans le rapport final. De plus, la Commission a créé un groupe de travail spécifique concernant des enfants et des violences sexuelles et basées sur le genre. La Commission s’est engagée à examiner et à exposer l’ampleur, le contexte, la nature, la gravité et l’impact des violences sexuelles commises pendant la
période du mandat.

La Commission a du se prononcer sur de nombreux cas de violences sexuelles perpétrées principalement par des agents de sécurité, d’anciens fonctionnaires du gouvernement ou par Yahya Jammeh lui-même.
La Commission a finalement fait 19 recommandations concernant les violences sexuelles et basées sur le genre.

Documents complementaires

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